C'était hier...
La patate en arrivant au boulot pour ce dernier jour... Bien décidée à faire rentrer mes 6 années de vie commune dans un petit carton comme les américains des séries télé... J'ai la chanson de Buddy Holly,
"That will be the day", dans la tête
(celle qui me rappelle le spectacle de Peach vu avec Maud à Amberieu il y a bien longtemps et qui, malgré nos déboires depuis, reste un bon souvenir). C'est cool ! C'est un 'ti peu ironique comme chanson : "You said you gonna leave but you know it's a lie" et "that will be the day when you'll make me cry". Avec ça Rebec' et moi on va pouvoir
rire jaune tranquilloutes sans verser dans le pathos.
D'ailleurs je commence d'entrée de jeu : sitôt arrivée je pose
mes clés sur le bureau de Christine en lançant un "Bon ! J'vous fout la mort tout de suite, comme ça c'est fait : je vous rend mes clés !" et je file dans mon bureau après avoir recueilli les regards marrons (noirs et jaune, quoi) des deux filles !
Ouais, du rockabilly c'est bien pour faire son p'ti carton : ça fout pas trop la mort !
Et hop, hop : le carnet d'adresses pro, les mémo AutoCad, mes affiches anti-fautes d'orthographe, mes zoulies images sur les murs...
Un p'tit tour coté ordinateur : les mails sont déjà transféré par imap sur mes boites gmail depuis 15 jours, il ne reste que les derniers de cette semaine. Je termine de lire les excellents blogs de
Thecle et d'
Eliza qui occupent les onglets de mon Firefox avant d'effacer les traces de mes surfs des deux navigateurs. Je tchatouille deci-delà sur Facebook...
Ouais, le rockabilly ça va bien un moment... mais... c'est un p'tit peu saoulant au bout d'une heure et demi !
Qu'est ce que je vais bien pouvoir m'écouter ? Aller, histoire de pas se fatiguer, je vais piocher dans mes playlist : au moins je suis sûre que ça me plaira.
- "Grosses guitares" ? Non ! Après mon trip "Aldebert" d'hier soir, le contraste serait trop rude. Et j'ai pas envie de métal.
- "Toute la journée" ? Non plus, c'est trop éclectique et j'ai pas envie de tomber sur de la techno.
- Aller, c'est parti pour "Du calme" ça commence par du Aldebert justement, pis d'ici que je tombe sur "l'île Hélene", un Volo ou sur Abd Al Malik j'ai le temps... Et de toute façon j'ai la patate !
Aller hop, hop, on continue : transférer tout mon dossier perso sur le DD externe, récupérer aussi les photos, fonds d'écrans et autres images cachées dans le Documents and Settings.
A petit retour au rangement physique : je retombe sur le
jeu des grenouilles auquel on avait tenté de jouer avec Rebecca entre midi et deux il y a 3-4 ans, les lys en origami, les fiches de vocabulaire que je faisais une fois par semaine pour amuser (et cultiver) la galerie du temps où j'avais encore le goût au boulot.
Ah, tiens, que cette intro est douce à mes oreilles... "No Surprises" de Radiohead !
Mais pourquoi j'ai comme un mauvais pressentiment sur la suite de mon moral ? Ah bah oui, juste derrière il y a "Little Girl Blue" de Janis Joplin. Ah ouais, quand même ! N'oublions pas que c'est LA chanson que j'avais décidé qui passerait le jour de mon enterrement (Et oui David, tu n'est désormais plus le seul à être le détenteur de ce secret... Et non, je n'ai pas oublié que pour toi c'est "dans les yeux de ma mère" de Arno !) Là non, hors de question que je plonge toute seule dans un trip nostalgie. Et pis Rebecca est aussi réceptive à Janis que moi : je file lui mettre ma playlist sur son ordi.
Pas besoin d'en rajouter, nous sommes dans les bras l'une de l'autre, les larmes aux yeux (sous les yeux ébahis de Christine et de Sébastien) ! Par fierté, par pudeur... et parce que le boulot, lui, n'attend pas, nous replongeons chacune rapidement à nos occupations... Mais le mal est fait : Janis repasse en boucle, deux, trois, quatres fois sur mon PC. Le "Woman left lonely" me hérisse le dos comme à chaque fois !
Quelques minutes plus tard, Stéphane vient s'enquérir de savoir si nous avons règlé la paperasse avec Christine : si le solde tout compte est bon, si j'ai bien toutes les attestations nécéssaires,... Je l'informe qu'on se réserve cette partie de plaisir pour la fin de matinée avec Christine.
J'ai à peu près terminé de rassembler mes affaires. Je débranche ma lampe de bureau et la glisse à la place que je lui réserve depuis le début dans la cagette. Le bureau fait tout vide d'un coup !
Stéphane repasse... "Les papiers, c'est bon ?" "Non, toujours pas... mais on verra ça à 11h et quelques Stéphane, ne vous inquiétez pas." "Bon, bon."
5 minutes après, il est à nouveau dans mon bureau. "Bon, heu, faut que j'y aille là ! Vous repasserez de toute façon ?" "Oh bin oui, j'viendrais vous faire coucou de temps en temps." "Bon, bin ça va alors : à bientôt !" et il part ! J'ai juste eu le temps de lui glisser un "Merci" avant qu'il ne disparaisse totalement du bureau.
(Oui, vous me manquerez, Stéphane. Oui vous étiez le meilleur patron que j'ai connu malgré ce problème cruel de communication. Oui je me suis fais plaisir tout au long de ces 6 années. Oui, c'est ainsi que ça fini, avant que nous nous détestions pour de vrai à force de trop de cohabitation. Oui... Vous allez me manquer !) Même pas une bise ! Rien ! Arfff, Stéphane et la communication. Je n'en attendais pas moins de sa part.
C'est au tour de Catherine de partir manger. Salutations joviales. Elle sait que je repasserai... et est persuadée que ma nouvelle vie à la maison sera agréable.
Et puis arrivent les papiers en question. Christine armée du solde tout compte, de la feuille Assedic, de l'accord de prolongation de la mutuelle, etc...
Signatures, photocopies, vérification... Enfin... dans l'autre sens en fait : vérifications, signatures, photocopies... Tout est en ordre... et pis je suis candide moi. Si c'est le cabinet de compta qui s'est arraché les cheveux dessus, je fais confiance.
Elle n'est pas revenue avec les seules photocopies de fin de contrat. Quatres enveloppes : deux pour les étrennes des enfants de la part de la société, une carte signée par mes futurs-ex-collègues et une carte bon d'achat chez Virgin de la part desdits collègues.
Le moment est solennel, Rebecca et Sebastien sont venus avec Christine accompagner leur petit mot d'une chaude bise.
Merci. Merci.
L'émotion est là... mais bien contenue ! Tout va bien, on gère !
Et pis aller, hop, assez trainé, il est temps d'aller chercher mes enfants chez Ouazna.
Malgré tout je traine en route... Une discussion qui n'a rien à voir à finir, un tech qui passe et à qui je souhaite un bonne fin d'année, une petite blagounette encore,... Aller, file Mariette ! Il faut que tu apprennes à partir !
Je recroiserai vite fait Christine, sortant des toilettes, les yeux bien plus rouges que d'hab'. Alors ainsi je ne serais pas la seule à essayer de jouer la forte ??!!
Vite, vite, partir... avant que ma façade ne s'écroule.
Voiture. Musique à fond. Il me semble qu'il fait beau.
---------------------------------------
L'après-midi se passe tranquillement : les siestes des enfants s'éternisent mais les conversations croisées sur le net me permettent de ne penser à rien.
C'est le soir que tout se gâte. Gilles me demande comment s'est passée cette dernière matinée. J'ai beau lui raconter avec tout l'humour que je peux avoir le déroulement de cette journée, son regard me connait et me laisse à nue devant lui.
J'ai envie de pleurer...
J'ai honte...
J'aimerai juste aller boire un coup, me bourrer la gueule dehors, ne plus y penser... Vite trouver quelqu'un avec qui se mettre la tête à l'envers...
(C'est quand même pas très sain des réactions comme ça ! J'me fais honte... Ce qui n'arrange absolument rien à mon envie d'aller picoler.)